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Un entretien avec Vlastimil Hort d'il y a quelques années
https://www.youtube.com/watch?v=MrpJNJjEQQ8&list=PLXThXCoc-Th8loJoJOgtvUcsRfk-mWwn1&index=4&t=0s
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C'est quand même quelqu'un qui a fait 7.5-8.5 en quart de finale des Canddats 1977 contre Spassky. Il perd la 15ème partie et le match au temps ...
On parlait dans un autre fil de la francophonie et des livres. D'après le beau portrait dressé par Monsieur Bertola sur le site EE, on découvre qu'il avait voulu apprendre le français pour mieux lire Baudelaire dans le texte. Comme quoi ...
Anecdote : il avait été intégré comme "personnalité" dans le programme Chessmaster, à côté de noms (très) célèbres.
L'occasion est donnée de revoir les parties de ce joueur qui, comme tant d'autres, fut aussi un déraciné, après son départ de la Tchécoslovaquie.
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Je connaissais extrêmement peu ce joueur. De réputation, uniquement. Malgré tous ses succès, je n'avais pas souvenir de ses parties. D'autre part, je n'avais lu que des commentaires positifs sur la personne.
Il y a quelques joueurs, comme ça, qui sont arrivés au top et qui passent un peu plus sous les radars.
Après, il y avait beaucoup de densité. Rien qu'en Tchécoslovaquie, j'ai plus de souvenirs de ses coéquipiers, certainement, Jansa, Smejkal, ou Kavalek. Peut-être une question de répertoire d'ouverture aussi.
De lui, je crois que Krogious racontait qu'il était passé au travers de la détection des jeunes talents dans son pays et que c'est par sa réussite à des tests soviétiques un peu abstrait, du genre faire passer un cavalier sur chaque case de l'échiquier qu'il avait été installé dans les programmes de formation pour le haut niveau.
@Athos
Quelle période pour Chesmaster?
Parce que, justement, le fait d'avoir quitté l'Est pouvait être une raison suffisante pour avoir été mis à l'avant à l'Ouest.
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@Julo62 : on le trouve au moins dans Chessmaster 4000 et Chessmaster 5000, à vérifier pour les éditions ultérieures. Son style agressif y est célébré !
Hort fait partie des grands acteurs échiquéens de l'après-guerre, même en second rideau. Il a affronté 8 Champions du monde et 2 Vices-champions, avec les résultats suivants, forcément contrastés mais honorables :
- Botvninnik : une nulle
- Bronstein : 1-0, 11 nulles
- Tal : 0-1, 15 nulles
- Smyslov : 1-3, 17 nulles
- Petrosian : 0-5, 11 nulles
- Spassky : 2-5, 34 nulles
- Fischer : 0-1, 3 nulles
- Karpov : 1-10, 14 nulles
- Korchnoi : 2-11, 20 nulles
- Kasparov : 0-2, une nulle
Si on enlève ses trois "bêtes noires" (Petrosian, Karpov et Korchnoi), cela donne un bilan que peu de GMI ordinaires ont.
On peut illustrer son style entreprenant à partir de sa victoire contre Lajos Portisch, très fort joueur, au Tournoi de Madrid 1975 (gagné par Karpov), dans un Gambit Dame orthodoxe, en 32 coups.
L'attaque du roque commence par 16. FXf6, puis suit un amusant ballet de la Dame blanche et un sacrifice de Tour fatal, au coup 30. C'est violent, comme du Baudelaire !
https://www.chessgames.com/perl/chessgame?gid=1057702
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@Athos
Comme je l'ai écrit, je connais extrêmement mal le joueur.
J'ai été surpris par le "style entreprenant". J'avais plutôt en tête (Pourquoi ? Je ne sais pas.) un joueur solide.
J'ai donc regardé la sélection de parties remarquables du site Chessgames.
Sa partie contre M. Chandler, en 1982 à Wijk aan Zee m'a tapé dans l'œil.
Dans une solide Caro-Kann classique, et dans une partie qui, déjà, avait longtemps dû suivre un chemin connu, avec les Blancs, il force l'abandon au 25e coup.
La partie :
Hort - Chandler, 1982, Wijk aan Zee
La position finale :
(Dans une position déjà désespérée, les Noirs viennent de menacer la Dame blanche par 24... f6.
C'est l'élégante poussée 25. h6 qui ponctue la partie, suite la plus forte qui promet le mat en quelques coups.)

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En Allemagne, Vlastimil Hort était très connu, aussi pour ses commentaires dans Schach der Großmeister diffusé en direct une fois par an sur une 3ème chaîne allemande de 1983 à 2005.
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@Julo62 : le style des joueurs qui font des longues carrières évolue bien souvent, et souvent dans le sens d'une économie, on l'a vu avec Petrosian et bien d'autres. Les deux parties évoquées montrent son attirance mécanique vers le roque adverse.
Je vais regarder d'autres parties de lui, et voir les points faibles que ses "bêtes noires" ont exploités.
Sur ce que j'ai vu pour l'instant, son style ferait peut-être penser à celui d'un Lasker, toute proportion respectée.
Sinon je confirme l'apparition du "profil Hort" à compter du Chessmaster 5000. Pour les amateurs, il est possible de le relancer avec une Dosbox.
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Une (modeste) investigation sommaire (mais passionnante), car il faudrait étudier des dizaines de parties pour avoir un avis plus autorisé, du jeu de Hort contre les "bêtes noires" permet d'avoir quelques impressions :
- tout d'abord son score assez étonnant avec les Blancs : sur 31 parties, il réalise + 1, -4, et donc 26 parties nulles, ce qui est impressionnant puisque ces 3 joueurs (Petrosian, Karpov et Korchnoï) ne lui réussissaient pas du tout;
- corrélativement, il a des résultats assez mauvais avec les Noirs;
- avec les Noirs, dans les parties vues, il multiplie les échanges perdants, cherche à se développer mais crée des faiblesses, et montre peu de ressources défensives (roque mal protégé, Roi mal placé), outre des limites en finale. Ceci dit il jouait là contre la crème mondiale.
Mais cela confirme un jeu entreprenant, la fin de carrière n'étant pas représentative du style initial d'un joueur. Son score avec les Blancs témoigne pourtant de la méfiance qu'avaient les 3 ogres à l'égard de ses ressources offensives.
Quelques exemples de parties sont significatifs :
- Korcnhnoï-Hort : Palma de Majorque 1969 (tournoi gagné par Larsen, mais Hort finit derrière, à égalité avec Viktor et devant Spassky). Une Est-indienne où Korchnoï commence l'assaut du Roque noir au coup 30, pendant que Hort, compressé, tente un contre jeu à l'aile-Dame :
https://www.chessgames.com/perl/chessgame?gid=1057310
- Karpov-Hort : Bugojno 1978 (gagné par Karpov, 15 rondes, Hort finit 6 mais derrière Spassky, Tal, Tinman et Ljubojevic, excusez du peu, et devant Larsen notamment). Dans une Caro-Kann, Karpov place une magistrale attaque du Roque, à partir du coup 9, victoire en 25 coups (il savait aussi aller dans un tel jeu agressif et combinatoire) :
https://www.chessgames.com/perl/chessgame?gid=1058000
- Karpov-Hort : Waddinxveen 1979 (gagné par Karpov), dans une Anglaise, Hort résiste au jeu très dynamique de Karpov mais perd une finale qui paraissait égale :
https://www.chessgames.com/perl/chessgame?gid=1058127
- Petrosian-Hort : Sarajevo 1972 (gagné par Szabo, 15 rondes), une Anglaise dans laquelle Tigran joue une attaque brillante (il savait le faire aussi), commençant par 23. Cxd5, toujours vers le Roque noir :
https://www.chessgames.com/perl/chessgame?gid=1057608
L'occasion de voir de belle parties (on ne s'ennuyait pas avec Hort), et de constater qu'un nombre sidérant des tournois qui existaient depuis les années 70 ont disparu. Des tournois souvent joués en 15 rondes, pas en 9 ...
Visiblement Hort ne prisait pas les jeux fermés et les longues manoeuvres, quitte à se retrouver en danger. Son pic aura surtout été dans les années 70 et il devait être pas loin du top 10. Chapeau l'artiste !
Et ... Vive le jeu classique (avec de longs tournois) !
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@Athos : '' il devait être pas loin du top 10.'' Bah...oui... même qu'il a été plusieurs fois dedans.
(n°6 en janvier 1977, n°7 en janvier 1978, ''seulement'' n°11 en janvier 1979 et n°10 même encore en janvier 1984).
@Julo62 : Bon...en fait... A chacun ''son Hort''... Je comprends assez bien que vous soyez ''passé à côté'' de Hort. Il y a eu tellement de forts joueurs et tellement de tournois.
Pour ma part, j'ai eu de la chance. Car les grands joueurs dont je connaissais l'existence, quand j'étais jeune, étaient d'abord ceux que mes co-équipiers et mentors du club avaient eu l'honneur de rencontrer sur l'échiquier (de précieuses sources d'information, plus concrètes et motivantes que l'étude des livres, des revues, de l'Informateur, etc...).
Hort, par exemple avait été l'un des bourreaux de Letzelter, à Monaco en 1969 (mais je n'ai découvert quelques une de ses parties que vers 1974). J'avais été étonné de voir que les meilleurs joueurs du monde pouvaient jouer des choses comme... l'Alekhine ! (Hort, mais bien sûr aussi Fischer!). Dans leur partie, Letzelter n'avait pas pesé lourd, dans une ligne un peu bizarre qui commence dans l'énergique attaque des quatre pions, pour bifurquer ensuite dans la ligne tranquille avec Fe2 et 0-0. Certes, Letzelter avait gaffé (un cavalier emprisonné), mais la position était vraiment déjà intéressante pour les noirs. D'ailleurs, j'ai découvert que Hort avait gagné une autre partie dans cette même ligne (avec Ch4) contre l'allemand de l'Est Pietzsch.
Ensuite, j'ai vu Hort plusieurs fois (de près !) dans les années 80, aux Olympiades de Malte (notamment) contre Haik, en Coupe d'Europe à Strasbourg (deux parties contre Kuligowsky), à l'Open de Metz (deux fois à l'échiquier, à côté de moi), etc... Et puis, un jour, je l'ai eu en face moi (2ème échiquier en Bundesliga) ... Aargh... Gasp... Je n'en menais pas large... Heureusement, il avait déjà 50 ans et j'ai pu sauver ma peau.
Une des parties préférées que je montre aux jeunes est ancienne :
Hort,V - Portisch,L [C47]
Monaco Grand Prix-02 GM Monte Carlo (9), 12.04.1968
1.e4 e5 2.Nf3 Nc6 3.Nc3 Nf6 4.d4 exd4 5.Nxd4 Bb4 6.Nxc6 bxc6 7.Bd3 d5 8.exd5 cxd5 9.0-0 0-0 10.Bg5 c6 11.Qf3 Bd6 12.Bxf6 Qxf6 13.Qxf6 gxf6 14.Rad1 Be6 15.b3 Rfd8 16.Ne2 c5 17.Ng3 Rab8 18.Bf5 Rb6 19.Rd3 Ra6 20.a4 Rb8 21.Rf3 Be5 22.Nh5 Bxf5 23.Rxf5 c4 24.Rd1 cxb3 25.cxb3 Rb4 26.Rxd5 Kf8 27.f4 Bd4+ 28.Kf1 Rc6 29.Rd8+ Ke7 30.Rfd5 1-0
Quand j'étais jeune, j'avais pu comprendre les liens avec mon livre de Euwe (sur les structures, pions doublés, case forte en f5, etc...). Position finale :

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Etre dans le top 10 dans ces années là était un exploit, quand les ordinateurs ne mâchaient pas l'ascension vers le top, et vu la concurrence d'alors.
Avec le correctif elo nécessaire (avant l'inflation du elo), il a dû avoir un pic vers 2720.
Il a joué très tard encore, en 2020, à 74 ans, il fait nulle contre Harikrishna dans une rapide.
Parmi les Vices-champions qu'il a affrontés, j'ai oublié le Grand Paul, Keres : 0-2, 7 nulles.
Voici une belle partie où, avec les Blancs, il monte à l'assaut dans une Ruy Lopez, au Championnat d'Europe 1961. Encore une partie acharnée, tactique et complexe où la riposte des pions liés noirs fait la différence. Il fallait oser défier Monsieur Keres dans un tel schéma de jeu !
https://www.chessgames.com/perl/chessgame?gid=1056959
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Bon... Là, il est très jeune (17 ans) et assez imprudent. D'ailleurs, il n'a fait que 3,5/10 dans ce Championnat d'Europe par équipe. Il jouait derrière Pachmann et Filip.
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Pour finir à son avantage cette revue des affrontements contre les Géants de son époque, honneur à lui avec sa victoire contre Karpov.
Malgré le 1-10, il n'a jamais perdu avec les Blancs contre le Russe : + 1, 10 nulles, ce qui confirme encore la manière dynamique avec laquelle il jouait les Blancs.
Partie jouée au Tournoi d'Amsterdam 1981, gagné par Tinman, 11 parties, seule défaite de Karpov qui lui coûte le tournoi, Hort finissant 4ème avec Smyslov.
Il s'agit d'un Gambit Dame Tartakover. Dame noire attirée pour reprendre sur 16. Ce5xFc6 (Fou noir mal placé, une faute positionnelle rare chez Karpov), Hort déclenche une brillante attaque de Roque commençant par 18. Cc3xd5 et Karpov perd tous ses coups de défense.
Victoire en ... 26 coups, et il n'est pas arrivé souvent à Tolya d'être brutalisé de la sorte, encore moins au faîte de sa gloire.
A mettre dans le "best-of" de Monsieur Hort, salut l'artiste ...
https://www.chessgames.com/perl/chessgame?gid=1058214
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