R. Huntington, journaliste spécialisé dans les échecs et travaillant pour Associated Press, a écrit un article suite à la décision d'Associated Press de ne plus couvrir les évènements échiquéens. Cet article peut être lu en anglais sur le site de Chessbase.
http://www.chessbase.com/newsdetail.asp?newsid=1323
Cet article me paraît important, c'est pourquoi j'en propose ici une traduction pour ceux que l'anglais rebute trop pour lire un long article.
J'ai fait de mon mieux, mais je ne suis pas anglophone. Ceux qui auront lu les deux versions et remarqué des erreurs ou imprécisions pourront les corriger en postant dans le fil de discussion. FdK Un adieu aux échecs 25.11.2003 Alors même que les échecs connaissent un boom, la plus ancienne et la plus grande entreprise d�??information, Associated Press (AP), a décidé de réduire considérablement sa couverture des échecs. Seuls les grands évèvements concernant Kasparov seront couverts, et au lieu du correspondant de confiance Robert Huttington, des reporters locaux vont se débattre pour fournir des rapports cohérents sur un jeu qu�??ils ne comprennent pas. Rob met clairement en cause la FIDE dans sa lettre ouverte au monde des échecs. Une lettre ouverte au monde des échecs (Par R. Huntington) Au cours des dernières années, j�??ai couvert les échecs pour AP. Moi-même (et le monde des échecs) avons eu la chance que AP a considéré opportun de couvrir largement les échecs, m�??envoyant non seulement aux deux championnats du monde (i.e. le match Kasparov-Kramnik et la version FIDE), mais aussi aux grands tournois comme Linares et Wijk aan Zee, le Grand Prix FIDE, les Olympiades, entre autres. Malheureusement, en septembre dernier, juste après l�??annulation du match Kasparov-Ponomariov, AP m�??a informé qu�??ils ne couvriraient plus la plupart des évènements échiquéens. Bien qu�?? AP ait évoqué des raisons économiques, l�??instant de la décision laisse peu de doute sur le fait que l�??inaptitude chronique de la FIDE à tenir un évènvement prévu au calendrier en a été le catalyseur. Après tout, AP avait dû par deux fois changer ou annuler des billets d�??avion qui m�??étaient destinés et avait été mise dans une situation désagréable quand le match de Buenos Aires avait été déplacé à Yalta et finalement annulé. Aussi regrettable que puisse être la décision d�??AP, on peut difficilement les en blâmer. Les mineurs dans les mines de charbon avaient coutume de transporter un canari en cage dans la mine pour les alerter sur la présence d�??un gaz invisible. Quand le canari mourait subitement, ils savaient qu�??il leur fallait sortir rapidement ou bien ils périraient également. Comme le canari mort, la décision de la plus grande société mondiale d�??information d�??arrêter de couvrir les échecs de manière régulière devrait être considérée comme une incitation à agir et à agir maintenant. Mon ami et collègue Mig Greengard pense que mon analogie avec le canari dans la mine est incorrecte. Pour lui, le canari est mort depuis des années et les mineurs sont déjà en train de mourir. Il a probablement raison, mais j�??écris cette lettre dans l�??espoir qu�??il a tort et qu�??il est encore temps. Cette lettre ne devrait pas être nécessaire. De multiples façons et sur de nombreux points, les échecs se portent bien et sont aussi populaires que jamais, particulièrement auprès des jeunes. Il y a plus de gens qui jouent aux échecs sur internet qu�??à n�??importe quel autre jeu. L�??explosion des échecs en Inde et en Chine, les deux pays les plus peuplés du monde, est remarquable. Il y a un an et demi, les choses paraissaient aller encore mieux. L�??accord de Prague promettait de guérir la rupture qui avait tant desservi la réputation des échecs auprès du grand public (les gens qui ne savent pas comment se déplace un cavalier savent reconnaître man�?uvres politiciennes et querelles de clocher). Un nouveau cycle de championnat du monde rationnel nous était promis et des réformes raisonnables paraissaient possibles. Tout cela bien sûr n�??était qu�??illusion. Les Président Ilyumzhinov est revenu à ses manières passées avec une vengeance. Une fois les Olympiades et la menace d�??une réforme passsées, le match Kasparov-Deep Junior fut baladé de décembre à janvier et de Jérusalem à New York ; le match Kasparov-Ponomariov fut annoncé à Buenos Aires en juin, puis à Yalta en septembre, puis annulé à la dernière minute. A ce moment-là on nous disait qu�??un tournoi de championnat du Monde aurait lieu en décembre. Maintenant on nous promet deux évènements pour le printemps prochain. Pendant ce temps, des organisateurs qui avaient prévu un évènement à Prague l�??ont annulé pour éviter d�??interférer avec le match de Yalta. Et ça continue encore et encore. Au moment où vous croyez que la FIDE a fait tout ce qui était possible pour se rendre, ainsi que les échecs, ridicule, elle se surpasse à nouveau. Il paraît qu�??Ilyumzhinov a dépensé 30 millions de dollars pour la promotion des échecs. S�??il avait donné l�??argent à la Fédération avec l'Intention de Detruire les �?checs (NdT en français dans le texte), le résultat n�??aurait pas été pire. Je ne dis pas que la FIDE soit coupable de tout. Il n�??y a pas de doute que Ponomariov a eu des exigences extravagantes et a contribué à l�??annulation du match de Yalta. L�??incapacité de Kramnik et Leko à fixer leur match est une grave déception. Mais au moins, ils n�??ont pas annoncé de match fantôme. La rupture initiale de Kasparov d�??avec la FIDE et la création de la PCA, qui a mené la FIDE dans les bras d�??Ilyumzhinov, était une révolution manquée. S�??il avait échoué ou s�??il n�??avait pas essayé, la situation ne serait certainement pas aussi mauvaise aujourd�??hui. Dans la vie réelle, les révolutionnaires qui échouent finissent au bout d�??une corde. Aux échecs, Kasparov n�??a serré la main d�??Ilyumzhinov à Prague que pour devenir une autre de ses victimes. Toutefois, ceci n�??est qu�??un détail comparé aux fautes de la FIDE et d�??Ilyumzhinov. A une conférence de presse à Bled, j�??ai interrogé le Président Ilyumzhinov au sujet du transfert soudain du Grand Prix d�??Abu Dhabi à Dubaï, du report du Grand Prix de Moscou, de l�??annulation des autres évènements du Grand Prix et du report du match Kasparov-Deep Junior à Jérusalem (qui devait au départ interférer avec le match de Kramnik contre un ordinateur à Bahrain). Sa réponse à été de rejeter la responsabilité du chaos sur les organisateurs locaux et d�??autres personnes. (NdT Suit une phrase concernant une anecdote relative au Président Truman, que je ne sais pas traduire). Si le Président Ilyumzhinov n�??est pas prêt à endosser la responsabilité de ce qui se passe sous son autorité, il devrait se retirer en faveur de quelqu�??un qui est prêt à le faire. Le plus grand mal que fait Ilyumzhinov est d�??effrayer les sponsors commerciaux légitimes dont dépendent tous les sports de nos jours. Les échecs devraient bien s�??en sortir dans ce domaine. Bien que peu nombreux, les sponsors sont de qualité (bien éduqués et concentrés dans le high-tech). Et les échecs présentent un avantage en termes de coût par rapport à d�??autres sports. Corus Steel parraine un énorme évèvement à Wijk aan Zee chaque année, y compris un tournoi réunissant quasiment tous les joueurs du plus haut niveau, les forts tournois de grands maîtres B et C, ainsi que des tournois amateurs. Tout cela revient à environ un million de dollars, à peine de quoi faire venir un joueur de premier plan dans un sport très populaire. Mais quand des sponsors potentiels considèrent Kirsan Ilyumzhinov, ils ne voient pas son incompétence traduite en planification et reports d�??évènements majeurs, ses efforts malavisés pour faire des échecs un sport olympique, ni aucun des péchés purement échiquéens dont je viens de l�??accuser. Au lieu de cela, ils voient les histoires de corruption en provenance de Kalmykie, les enquêtes sans fin des autorités de Moscou concernant des millions disparus, ses liens avec Saddam Hussein, le meurtre de Larisa Yudina, et ils cherchent quelque chose de plus recommandable à parrainer. Tous les sports, y compris la boxe, ont maintenant meilleure réputation que les échecs. Ce qu�??il faut faire en premier lieu est évident : se débarrasser d�??Ilyumzhinov, même si cela signifie la banqueroute pour la FIDE. Il est aussi évident que, bien que nécessaire, c�??est insuffisant. Ce qu�??il reste à faire en dehors de cela, est sujet à débat et devrait être débattu. Je ne peux pas faire grand chose en dehors de conseiller à tous dans le monde des échecs de jeter l�??anathème sur la FIDE jusqu�??à ce qu�??Ilyumzhinov soit parti et que des réformes soient réalisées. Bien que j�??aie peu de suggestions à faire au-delà de la plus évidente, mon diagnostic des problèmes est le résultat de la position particulière que j�??ai occupée en tentant d�??expliquer les échecs aux non joueurs, pas seulement le large auditoire que AP atteint à travers les journaux qui en sont membres et autres truchements à travers le monde, mais aussi aux rédacteurs en chef et dirigeants d�??AP. J�??espère réellement, sans la moindre attente, qu�??avec des réformes majeures les échecs peuvent améliorer la perception qu�??en a le public, de sorte qu�??AP puisse à nouveau considérer les évènements échiquéens comme dignes d�??être couverts. Sans une telle réforme, je ne doute pas que la réputation des échecs va se dégrader plus encore et que les échecs auront toujours plus de difficulté à toucher un plus large public. Je voudrais terminer cette lettre sur une note positive en exprimant mes sincères remerciements à ceux avec qui j�??ai pris du plaisir à travailler ces dernières années, non seulement les divers rédacteurs en chef d�??AP, mais spécialement ces organisateurs qui, bien qu�??ils soient les plus professionnels et les plus honnètes qu�??on puisse imaginer, risquent de perdre une précieuse couverture médiatique du fait de la décision d�??AP. Je parle en particulier des personnes formidables qui sont derrière les tournois de Linares et Corus. Je veux aussi remercier les joueurs dont j�??ai eu le plaisir de couvrir les apparitions et que j�??ai observés de près. Ils sont presque tous des gens de classe, et en particulier Vishy Anand, et ils ne méritent ni la réputation que leur font parfois des joueurs plus connus, ni le sort auquel les politiciens qui gèrent les échecs les condamnent. Finalement, je veux remercier mes collègues, en particulier Arvind Aaron, Aviv Friedman, Leontxo Garcia, Mig Greengard, John Henderson and Dirk Jan ten Geuzendam. Ils ont fait de toutes les salles de presse où je me suis trouvé, même celles dirigées par les plus incompétents et les plus difficiles des organisateurs, des endroits agréables. Sincèrement. Robert Huntington
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