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Musique-Echecs 1 par ins174 le  [Aller à la fin] | Théorie |
Quelques uns savent qu'à côté de/sous mes plaisanteries je m'occupe aussi avec des sujets "sérieux", en particulier les rapports/analogies/comparaisons entre échecs et musique, alors allons-y:

Une grosse difficulté pédagogique musicale (en tout cas pour moi) consiste à "essayer" de faire "entrevoir-sentir" aux élèves des notions musicales très difficilement sinon impossibles à faire passer avec des mots mais très importantes, surtout pour les haut-niveaux qui ont dépassé les problèmes techniques de base.
Une opinion/conseil émise par un joueur éminent (pas: et minant) sur France-Echecs m'a beaucoup interressé:

Je joue mes parties sans calculer de longues variantes mais je passe beaucoup de temps a "sentir la position".

Pour moi l'analogie est frappante. Pour bien jouer une phrase musicale, il faut d'abord la "sentir", se la chanter intérieurement AVANT de s'occuper de la technique instrumentale appropriée. Pour bien jouer sa partie d'échecs il faut "sentir" la position, oserai-je dire "se la chanter" AVANT d'envisager des moyens tactiques appropriés.

Qu'en pensez-vous? Tous les avis sont les bienvenus.
Une piste passe sûrement par ce mot-valise/fourre-tout/auberge espagnole qu'on nomme "l'intuition".
D'autres pistes?

Merci d'avance, Yvap.

PS: le même message est sur Notzaï, mais je cherche à toucher le plus de monde possible.


Intuition vs calcul Je ne sais pas si cela a un rapport, mais j'ai lu quelque part que les joueurs d'Echecs, de haut niveau du moins, se divisent en deux categories : Les intuitifs et les calculateurs.Les joueurs de la premiere categorie "sentent" la position et se basent sur l'intuition et sur leur propre experience et leur propre "feeling" pour prendre des decisions, et ils effectuent peu de calculs. On y retrouve Capablanca, Karpov, Petrossian, etc.Les joueurs de la deuxieme categorie recherchent plus de combinaisons directes, ont une capacite de calcul mental enorme et s'en servent pour prevoir des positions precises a de nombreux coups a l'avance. On y retrouve Alekhine, Fischer, Kasparov, etc.Pour ma part, j'aurais tendance a etre plus nuance et a dire qu'un bon joueur doit se situer entre les deux, ie doit savoir sentir la position mais aussi calculer des variantes concretes pour verifier que son intuition ne le trahira pas.Je crois aussi que c'est une question de personnalite et de sens artistique : Un joueur de formation scientifique, plus cartesien, aura tendance a calculer et a envisager des actions concretes.A l'inverse, un joueur de temperament plus reveur et attire par les arts (comme la musique justement), aura tendance a "rever" aussi sa position et a envisager des idees originales et plus abstraites sans pour autant faire de longs calculs.Mais d'un autre cote, la personnalite d'un individu est une chose complexe qui ne se divise surement pas en deux simples categories.


ins174, le
Bien! Très intéressant! Mais, il ya toujours un "mais", c'est effectivement le genre de réflexion que j'ai pu trouver à droite et à gauche dans mes recherches sur le sujet, mais je trouve que ça reste un peu trop généraliste, ne m'en veut pas!

J'aimerais plutôt que vous me parliez de VOS expériences personnelles: Comment sentez-vous les positions et leur nature? C'est visuel? émotionnel? charnel? que sais-je?
La mémoire y joue quel rôle? ça vient comme une certitude soudaine, un flash? c'est laborieux? douloureux?
Sûrement un peu de tout ça, mais ce sont justement ces "bouts" d'explications qui sont les plus près de la réalité vécue et les plus utiles pour essayer de déclancher quelquechose chez les élèves.
Je sais que ce n'est pas facile d'exprimer ce qui ne passe la plupart du temps pas par des mots, c'est bien le problème, on peut peut-être essayer quand même.

Yvap.


ins174, le
Alors les p'tits loups! Vous avez rien à dire?
Vous êtes superstitieux? Passer après "treize" vous inquiète? Qui l'eut cru?

Je sais que j'ai une réputation de plaisantin, mais tout de même! Sur un sujet pareil, y a pas de piège.Yvap, sensitif frustré.


Voila un sujet interessant Mon cher Yvap,
Moi meme guitariste et joueur d'echecs, je pense voir egalement une certaine analogie entre la musique et les echecs.
Il est vrai que pour bien jouer un morceau, il faut dans un premier temps apprendre correctement sa partition. Aux echecs, quand on veut bien jouer une ouverture, on prend un bouquin et on bosse. Une fois, que l'om connait cette partition, il faut s'entrainer a la jouer avec le CD original en fond sonore, pour voir si on est dans les temps. Aux echecs, une fois qu'on a potasse son ouverture, faut blitzer avec un pote pour voir si on y a vraiment compris qq chose, ou si on a juste appris par coeur les variantes.
La memoire est bien entendue tres importante: en musique, tu joues devant qq personnes, et tout d'un coup, il te manque un accord, et paf! c'est le bide total. Aux echecs, si tu recites ton ouverture tu oublies un coup, en general, ca ne pardonne pas non plus. (la je sais vraiment de quoi je parle;o) )
Sentir une position aux echecs, pour moi, c'est a la fois visuel et emotionnel. Visuel car cela me donne une premiere idee de qui s'y passe, et emotionnel, car a mon avis, pour bien une position, il faut la sentir. En musique, c'est pareil (ceci n'engage que moi bien entendu): tout d'abord, il y a l'effet auditif (parallele visuel aux echecs/ auditif en musique), qui donne une idee du type de musique que l'on ecoute, ensuite, il ya le cote emotionnel, pourquoi telle ou telle chanson te fait vibrer etc.
Voila tout ce que j'avais a dire sur un sujet tres interessant.

PS: Dis-moi yvap, tu pourrais pas nous mettre un petit mot dans ton profil?


Pr***, le
en deux mots... Je ne crois pas non plus qu'on puisse faire une distinction nette entre intuition et calcul. Je ne pense vraiment pas pouvoir me classer comme joueur tacticien, disons donc que je joue posi, même si évidemment ce n'est qu'une question de préférence et qu'il faut de tout. Mais je ne pense pas pouvoir me qualifier de joueur intuitif, bien que mon principal boulot dans ma partie, c'est justement de "sentir" ma position, et de calculer seulement ensuite en fonction des idées que je veux suivre. En revanche, le joueur "intuitif" serait plutôt du genre à jouer un coup sans calculer à fond, parce que l'issue envisageable semble lui plaire. Au plus haut niveau, On est obligé de qualifier Tal de joueur profondément tacticien, mais il est également reconnu qu'il était profondément intuitif, dans le sens où il voyait beaucoup mais pas forcément tout... Faire une opposition entre les deux me semble donc aberrante, la bonne vieille opposition posi/tacticien étant peut-être un peu meilleure...Tu parlais des meilleurs joueurs mondiaux que l'on classait dans telle ou telle catégorie. En ce qui les concerne, évidemment ils maitrisent tout, et leur qualification tient surtout du fait de ce qui les distingue des autres. Si Karpov est un joueur posi, fabuleux en finale, c'est également un monstre de calcul, mais ce n'est pas le trait qui le caractérise auprès du public.Enfin, à propos des sensations ressenties au cours de la partie d'échecs, je me joins aux précédents messages que c'est clairement émotionnel. La quantité de stress est absolument fascinante, et à cet effet une rumeur courrerait comme quoi des études avaient déterminé en ex URSS que c'était le sport/activité qui provoquaient la synthèse la plus importante d'adrénaline :réalité ou fiction propagandiste, en tout cas le stress est bien là.Lorsque je joue mes parties sinon, j'éprouve parfois lorsque je me rends compte qu'un coup que je trouve mauvais a été joué sur l'échiquier, que ce soit de mon côté ou de l'autre, je ressens un pincement au coeur, ou alors mon coeur me manque pendant un instant. Cette manifestation physique des troubles émotionnels ressentis lors d'une partie est flagrante n'est-ce pas ? :-)Je ne sais pas trop si je suis resté sur la bonne voie, mais j'espère avoir apporté quelques idées. :-)A votre ServiceOlivier


Pr***, le
il ne veut pas sauter de ligne où j'ai des chromosomes en moins ?? désolé pour le tas ci-dessus, mais mes textes ne respectent pas mes sauts de ligne. Désolé donc...


ins174, le
Bien! très bien! c'est ça, donnez moi des impressions personnelles.

Cher prométhée, excusez-moi de mettre le doigt là-dessus, mais ce que vous décrivez: le stress, l'adrénaline, pincement au coeur, ça s'appelle le trac! ça porte pas d'autre nom! et ça fait partie du plaisir du jeu, je suis bien d'accord, comme du plaisir de s'exposer sur une scène pour un musicien. Merci.

Yvap.

PS: pour les sauts de ligne, il faut utiliser les balises html, eh oui! en l'occurence le signe: plus petit que, suivi de: br, suivi du signe: plus grand que.
On fait mieux sur le plan pratique, n'est-il pas?


Pr***, le
Oui, mais.... Je suis d'accord pour appeler cela le trac, mais dans ce cas il est "pendant" la partie, et non avant....


ins174, le
avant, pendant.... Pour moi, des fois il est là avant et se fait oublier rapidement(signe que ça se passe bien), des fois pas avant et apparaît pendant (le plus désagréable car en général c'est signe que ça marche pas fort!), des fois tout le temps, et des fois retrospectivement! alors?


Par où commencer tant la multitude des questions soulevées dans tes deux articles, cher Yvap, est stimulante.Bien je rassemble mes idées.1° Tu parles de "chanter une partie d'échecs". Belle expression, qui nous amène inéluctablement à nous intéresser au concept "intuition-calcul". Puisque tu recherches des expériences personnelles, voilà ce qui m'a toujours intrigué. L'on joue sa partie paisiblement : développement des pièces, manoeuvres positionnelles, pièges tactiques... L'on joue quoi ! Puis soudainement, serait-ce la grâce, l'on VOIT un coup qui échappe à toute considération rationnelle. On y pense sans savoir pourquoi. On y pense. Et c'est le meilleur coup. (Je sais que certains entraîneurs recommandent de commencer à regarder les coups qui mettent les pièces en prise, mais je ne fonctionne pas comme cela). Aussi me suis-je toujours demandé pourquoi ? Un autre jour, à une autre heure, contre un autre adversaire, cela ne serait pas arrivé. Magie de l'improvisation, de la spontanéité ? Je pense qu'il puisse s'agir d'une mémoire inconsciente, d'une réminiscence, comme on dit. Puisse la noble assemblée m'apporter des éclaircissements.2°Le trac. Hé oui, que sont les échecs ? Un sport ? un art ? une science ? Un peu des trois, c'est entendu. Cependant, l'on sait que l'artiste n'a le trac généralement qu'AVANT d'entrer en scène. Après il joue. Il n'en est pas de même, à mon sens pour le sportif ou le joueur d'échecs, car il se voit jouer. D'où la bien connue "peur de gagner", qui fait perdre comme chacun sait. Pour peu qu'on sur-interprète la fameuse formule "rien n'est plus dûr que de gagner une partie déjà gagnée", l'on arriverait au paradoxe de ce type "facile de gagner une partie perdue". D'autant plus que la zeitnot a spécialement été conçu à cet effet. Quoi qu'il en soit, il n'y a rien de si subtil, agaçant et nécessaire (le joueur d'échecs serait-il masochiste) que de penser (panser?) sa "peur" avant la partie."Je n'ai connu qu'une seule passion : la peur" disait l'autre.Aussi m'arrive-til avant une partie d'avoir peur de ma peur. C'est elle qui pourrait me faire perdre, pas mon adversaire?Qu'importe !3° Le rythmeQu'est-ce ? Le souffle. De la vie. Pas de musique sans rythme. C'est bien connu. Et aux échecs, le facteur temps est essentiel. Je vous conseille à cet égard un article "sensing the tempo" dans un des livres de Dvorestky. Qu'on me pardonne d'avoir oublié le titre. Dans l'harmonie d'une partie d'échecs, un coup "thématique" n'est bon qu'à un moment donné. Et parfois l'on attend, l'on attend... et kwac!Plus anecdotique mais délicieux. Blitzer en musique. Personnellement, je raffole des stones ou de rap, surtout en 3/3. Il y a le boléro également. Mais plutôt au Luxembourg. Et puis il faut chanter faux et fort. Naturellement. Certaines chansons paillardes ne sont pas totalement dénuées d'intérêt non plus.4° Dernière chose enfin. Le style. Ou le genre de musique. Karpov-Bach. Kasparov- Wagner? Tal- le jazz à n'en pas douter... Je m'égare, et je ne saurais guère justifier mes analogies. Néanmoins, j'aimerais sincérement qu'elles vous parlent.Voilà.Merci Yvap et les autres pour ce beau débat et "que le soleil brille".N


ins174, le
Merci Très beau texte! Tu m'excuseras de ne pas répondre en détail tout de suite, mais je suis très pris en ce moment et je voudrais faire ça tranquillement.

encore merci, Yvap.


C'est moi qui te remercie Yvap Je craignais que mes élucubrations ne laissent définitivement muets la noble assemblée. Aussi me suis-je permis de recopier ce texte dans "muisque-échecs 2".Dans l'attente que ce débat ne se termine pas decrescendo...N


L'intuition Je vais faire un exposé trés didactique sur l'intuition afin d'éviter certaines confusions.

On retrouve dans l'histoire de la pensée et dans les échecs de nombreuses marques d'intuition mais au fond qu 'est ce que l'intuition?
Au premier abord, elle se caractérise par la saisie immédiate de l'objet qui est intuitionné. L'intuition ne se fait donc ni par la médiation de l'analyse ni par celle du symbole ou de l'image. C'est la raison pour laquelle on a traditionellement (et ce débat s'en fait l'écho) opposé la pensée intuitive à la pensée discursive ou symbolique.
Petit rappel : dans la pensée discursive la vision de l'objet (de la position ) résulte d'une décomposition et d'une recomposition de tout les éléments qui constituent cette objet. De la même facon la pensée symbolique construit l'objet à partir d'images multiples puis unifiées. Dans les deux cas ,il s'agit de raisonnement par étape. A contrario l'intuition ne se déroule pas dans le temps, il y a une simultanéité de touts les caractères de l'objet.

Mais cette oposition entre la Dianoia ( pensée discursive étape par étape vers la connaissance de l'objet ) et la Noésis ( désigne la pensée intuitive) càd la saisie immédiate de l'essence d'une position par ex )est elle réellemnt fondée ? En effet comment comprendre cette immédiateté ? Par la synthèse temporelle de la sucession des étapes du raisonnnement que l'esprit par habitude effectuerait de plus en plus vite pour finir par l'effectuer intantanément ? Si elle est irréductible et singulière ,l'intuition ne consituerait elle pas une forme de pensée absolument originelle ?

Pour la définition de l'intuition je ferai appel à un de nos plus brillants philosophes-scientifiques et probalement le dernier à avoir concilier avec brio ces deux activités Claude Bernard : l'intuition
"une conception à priori,
un sentiment vague des choses,
une interprétation anticipé des phénomènes" L'intuition n'apparait pas comme une pensée accomplie mais simplement comme une ébauche de pensée dont la valeur de vérité reste relative ce qui explique les erreurs pouvant être commises aux échecs comme dans tout les domaines "à cause " de l'intuition
De plus nous ignorons de quelle faculté de l'esprit relève l'intuition.

Pour conclure je pense que l'intuition présente cet avantage de libérer de l'emprise des faits et de l'autre coté de l'emprise du raisonnement. Il n'en demeure pas moins que si l'intuition se présente au joueur comme une évidence subjective, elle ne suffit pas à fonder une conception. Cette démarche doit être validée par le retour des faits et du raisonnement.






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